Je n’ai pas noté les chiffres exacts mais je suppose que la Taupe Vespérale, aka Ricardo Gutierrez qui a donc fait son coming out hier et qui n’a pas arrêté de prendre des notes, nous donnera des détails. En gros, les journalistes indépendants sont payés une misère, quand il le sont. Et ça, ca n’est pas normal.
D’une manière générale, je dois bien avouer que les différents panels n’ont pas été hyper instructifs. Les pontes de nos groupes de presse répétant qu’ils étaient « un business en crise », que « de gros investissements avaient été faits » pour contrer (?!) la montée en puissance du web, et qu’il ne faut donc pas s’attendre à des améliorations salariales dans les années qui viennent « vu l’équilibre précaire » auquel ils doivent faire face. Il y eu certes quelques nuances et détails intéressants selon les rédactions, mais globalement tous avouent que les temps sont durs et reconnaissent qu »‘il va falloir se bouger pour s’adapter » à l’ère multimédia.
Ils vendent leurs canards comme des savonnettes ou du dentifrice, alors forcément, si les ventes baissent, ben faut vendre plus …. avec des coûts de production identiques, off course. Et ca coince…. alors on fait un procès à Google-le-vilain-voleur…
Clairement, le web est vu comme une sacrée tuile qui leur tombe sur le coin de la rotative, impayable (dixit Jean-Jacques Jespers) et, évidemment, déontologiquement journalisticide. Inutile de vous dire que j’ai failli bouffer la banquette à plusieurs reprises vu le paquet de conneries entendues au cours de la journée.
En fait,ce qui m’a le plus frappé, c’est qu’ on a beaucoup parlé du marché de l’emploi mais pas du tout du marché tout court. En gros, il s’agit surtout de « bosser pour une rédac », pas de « bosser pour un public ».
Plutôt que de tortiller du cul pour savoir si l’Ihecs à une meilleure formation que l’Ecole de Journalisme de Louvain, si les stages de l’ULB sont plus funky que ceux de l’ULg, pourquoi diable n’ont-ils pas abordé les géniaux bouleversements qui s’opèrent dans le chef de ceux qui nous lisent/écoutent/regardent/ et qui ont désormais l’occasion de nous renvoyer non seulement du feedback, mais aussi de participer au processus même de l’info ? Le vrai putain de changement il est là ! c’est pas le web qui fout le bordel, c’est ce que les gens en font … et ça , les pt’its gars, va falloir se le rentrer dans la tête.
Non. Te moeilijk meneer, te gevaarlijk ! Si on écoute la foule, on ne ferait que du Gilbert Dupont. Il est de notre devoir (tadam) de lui proposer un autre regard (avec le dvd de Shrek en bonus) … Nous les journalistes, Nous sommes détenteurs du 4ème pouvoir. L’info, c’est Nous qui la sélectionnons et qui la transmettons selon Nos codes. Nous connaissons Nos audiences et Nous savons ce qui est bon pour elles. Les internautes ne véhiculent que des rumeurs et sont indignes de jouir des mêmes privilèges que Nous (parce que Nous sommes bien sûr totalement intègres face aux pouvoirs politiques et économiques, off course) Nous sommes les élites (un vrai journaliste est universitaire) et le web n’est qu’un pillage organisé par Google de nos excellentes productions. … argl
Djeess, je caricature un peu mais en gros si le business se casse la gueule, ce n’est de la faute de personne. Je n’ai pas assisté au dernier panel avec les représentants des politiques mais je doute qu’ils aient entonné un autre refrain (ce n’est de toutes manières jamais de leur faute, eux :-) J’aurais peut-être dû rester, juste question de savoir si un bloggeur pouvait prétendre à une aide publique à la presse :-)
Heureusement, comme à chaque fois dans ces « congrès » (c’est pareil dans les conférences 2.0), le networking à la pause café parvient souvent à rattraper le coup. J’ai ainsi été ravi de discuter avec Marc Chamut, le président de l’AJP, Béatrice Delvaux et Daniel Van Wylick, Marc Simon … ainsi qu’un pigiste français qui était sidéré de voir le traitement financier réservé à ses collègues belges. En France, le titre de pigiste est reconnu (et les stages sont rémunérés ! viens-z’y voir en Belgique.. ) Je retiendrai aussi l’intervention de Christiane Dupont, journaliste québécoise qui a roulé sa bosse de free-lance et dont je vais m’empresser de commander le bouquin « les nouveaux journalistes. Le guide: Entre précarité et indépendance ».
Je m’en voudrais de terminer ce billet sans remercier l’AJP d’avoir organisé ce congrès. Il a eu le mérite d’exister de remettre certaines pendules à l’heure. Puisse-t-il permettre aux pigistes, aux indépendants et aux journalistes en général de mieux gagner leur vie en se mettant au service de leurs publics. On a beauoup parlé du maintien de la qualité de la production, c’est évidemment crucial pour une démocratie que de pouvoir compter sur des troubles fêtes et des empêcheurs de tourner en rond pour rester saine. Mais cela a un prix (et pas forcément sonnant et trébuchant, une petite dose d’humilité de temps en temps, ça ne coûte pas cher)
Bref, on s’était dit qu’on se ferait bien un petit débriefing podcasté plus détaillé avec Ricardo et Mehmet mis le temps a manqué. Messieurs, si ça vous tente toujours on se boit un kawa un de ces quatre … et si certains d’entre-vous veulent venir nous expliquer ce qu’ils en pensent, don’t hesistate, drop us a line.
Pour suivre le congrès, qui se prolonge ce vendredi avec des interventions de représentants français, anglais, canadiens, checkez le blog de l’ajp
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